Historique

Découvrons ensemble l’histoire magnifique de cette Alma Mater.

  1. La préhistoire du Grand Séminaire Theologicum de Malole
  2. La naissance

La vocation sacerdotale au Kasayi est née à Mikalayi, première Mission Catholique fondée dans notre province en 1891 par le missionnaire de Scheut Père Emery Cambier, à son arrivée, et plus précisément au sein de l’Ecole Normale pour garçons qui y fut créée en 1914, avec, comme objectif déclaré d’ « être une pépinière de catéchistes destinés à aider les missionnaires dans l’œuvre de l’évangélisation ». C’est ainsi qu’ « un cours théorique et pratique de méthodologie y sera donné et aussi un cours pratique et théorique d’hygiène, d’agriculture et d’élevage ».

Le fondateur de cette Ecole Normale, le Père Egide De Boeck, le précise en ces termes, dans une lettre datée du 30 mai 1914 à destination de tous les missionnaires du Kasayi : « Chers confrères, le besoin extrême que nous ayons de bons catéchistes m’a fait décider la création d’une école de catéchistes à la Mission de Luluabourg (c’est-à-dire, Mikalayi). Avec les bénédictions du ciel, que nous implorons tous ensemble, cette école pourrait devenir une pépinière de bons Evangélisateurs, voire une institution préparatoire à un futur petit séminaire. Je vous prie donc de diriger sur St Joseph, pour le premier septembre prochain, quelques enfants choisis, doués de bonnes qualités intellectuelles et surtout morales. Il faudrait qu’ils sachent au moins lire et écrire. Pour le moment, les adultes, même mariés, ne sont pas exclus »

En effet, déjà la réunion des Supérieurs Ecclésiastiques du Congo Belge à Kisantu, en 1913, avait préconisé la formation de futurs prêtres autochtones et demandé aux missionnaires « d’user de leurs meilleures forces pour l’œuvre de la formation de futurs prêtres ». D’ailleurs, dès 1898, Mgr Roelens et des Pères Blancs, avait fondé le tout premier Petit Séminaire du Congo Belge à Mpala, sur les bords du lac Tanganika, et le premier prêtre autochtone de notre pays, issu de ce Petit Séminaire et ensuite du Grand Séminaire de Baudouinville (actuel Moba à Kalemie) fut l’abbé Stephane Kaoze, ordonné en 1917. Et ce serait, semble-t-il, en apprenant cette nouvelle et à la vue d’une photo de cet abbé que certains élèves de l’Ecole Normale de Mikalayi auraient exprimé le désir de devenir eux aussi prêtres. Parmi eux, deux finalistes de cette école, Charles Mbuya, qui deviendra le tout premier prêtre du Kasayi le 1/7/1934 et Evariste Kalonji, qui quittera au terme du cycle de Philosophie. Ces deux commencèrent donc à recevoir de leur directeur, le Père Emile De Cock, les premières leçons de latin, comme le début effectif du nouveau Petit Séminaire de Mikalayi, tout en continuant à loger et à vivre à l’Ecole Normale.

  1. La croissance

Le premier Evêque du Haut-Kasayi, alors appelé Vicaire Apostolique, Mgr Auguste De Clercq, trouva, en 1919, en arrivant à Mikalayi, une résidence officielle des Evêques de Luluabourg-Kananga jusqu’aujourd’hui, 8 jeunes gens qui apprenaient le latin en vue du sacerdoce. Il en fit la prunelle de ses yeux et organisa une maison à part pour les séparer de leurs collègues normaliens, maison qui fut désormais appelée « maison des Bena Mbuya », puisque Charles Mbuya était l’aîné de ce groupe de séminaristes.

Quelques années plus tard, Mgr De Clercq construisit un tout nouveau bâtiment pour ses séminaristes, à l’emplacement actuel du Noviciat des Frères de St Joseph. Le Petit Séminaire de Mikalayi, ancêtre de ce Grand Séminaire de Malole, était véritablement né et commençait, installé dans ses propres infrastructures, sa belle croissance, même si les séminaristes, à part leurs leçons de latin, continuaient à aller suivre tous les autres cours à l’Ecole Normale.

C’est en 1923 que les deux premiers petits séminaristes, Charles Mbuya et Evariste Kalonji, entrèrent en Philosophie et firent trois années de cours de Philosophie sous la conduite du Père Camille Leuridan, qui avait déjà enseigné la philosophie aux jeunes du Scholasticat de Scheut en Belgique avant de venir au Congo. Et, au terme de leur troisième année de Philosophie, comme déjà dit, Evariste Kalonji abandonna la voie du sacerdoce tandis que Mbuya Charles et un séminariste de deuxième année de Philosophie, René Tshibuabua, furent envoyés au Grand Séminaire de Baudouinville pour y poursuivre leurs études sacerdotales, car on ne pouvait pas trouver au Kasayi même des professeurs appropriés pour les études de théologie et juste pour deux étudiants.

Pour dire un mot de la qualité de l’enseignement dans ce séminaire naissant, on estimait, d’après le Père Joseph Van Keerberghen, qu’ « il dépassait de loin tout ce qui se faisait dans d’autres écoles, car on était persuadé que la formation intellectuelle des futurs prêtres devait être sérieuse et profonde et qu’elle ne pouvait pas être en reste par rapport à la formation morale et religieuse qui leur était donnée ».

  1. Le transfert du Petit Séminaire de Mikalayi à Kabue

1° Le motif du transfert

Arrivé dans son année scolaire 1928-1929, le Petit Séminaire de Mikalayi comptait en son sein 64 séminaristes. Son directeur d’alors, le Père Aimé Van Zandijcke, souhaita vivement son transfert vers un lieu plus retiré pour cette raison fondamentale qu’il expliqua à Mgr De Clercq dans une lettre du 8 septembre 1926 : « Je remarque de mieux en mieux que le Séminaire est très mal placé ici au centre de la Mission. Nous n’arrivons pas à transformer la mentalité des séminaristes : tout ce que nous disons et faisons est immédiatement neutralisé par le milieu dans lequel ils se trouvent. Ils ne savent pas bouger sans rencontrer d’autres personnes ; ainsi leur tête est toujours pleine de préoccupations de toutes sortes. Je comprends les difficultés matérielles qui empêchent de trouver un remède à cet état malheureux, mais j’espère de tout mon cœur qu’une solution soit trouvée aussitôt que possible ».

Deux ans plus tard, en 1928, il obtint ce qu’il demandait : le transfert du Petit Séminaire de Mikalayi à Kabwe (il est intéressant de noter cette motivation du Père Van Zandijcke, qui correspondait à la conception de la formation des prêtres indigènes en ce temps-là, afin de mesurer le changement radical de conception qui interviendra une cinquantaine d’années plus tard).

2° L’installation du Petit Séminaire à Kabwe

La découverte du terrain qui allait abriter le Petit Séminaire à Kabwe s’était faite comme par hasard au cours d’une promenade du Père Aimé Van Randycke et ses 9 petits séminaristes de Mikalayi avec lesquels il passait quelques jours de vacances de Pâques 1923 à Kabwe qui était, en ce moment-là, une succursale de Mikalayi, desservie par lui-même.  C’est là qu’ils aperçurent un beau plateau avec des chênes d’Afrique, appelé « Tshibaala-Nsanga » (Tshibaala signifie plateau et Nsanga signifie chênes d’Afrique). Le choix du Père était immédiatement fait et c’est ce plateau qu’il avait en tête lorsqu’il écrivit trois ans plus tard à Mgr De Clercq sa lettre susmentionnée, conformément au proverbe luba qui dit : « Muaba muidikija munu utu uya nzubu » (un endroit que tu as désigné du doigt, tu y construiras plus tard ta maison).

Le 17 mai 1928, le Frère Jan Damiaens fut envoyé à Kabwe pour y commencer la construction en pisé des premiers bâtiments provisoires du Petit Séminaire. Et au début d’octobre 1928 les cours commencèrent dans cette nouvelle Maison de formation sacerdotale avec les 64 élèves venus de Mikalayi, dont les plus avancés étaient en Poésie, ou actuelle 5è secondaire, sans compter Charles Mbuya et René Tshibuabua qui étaient au Grand Séminaire de Baudouinville-Moba. Notons ici qu’à part Charles Mbuya aucun de ces 64 séminaristes ne devint prêtre, alors qu’on les avait retirés du centre Mikalayi pour mieux les former au sacerdoce dans la brousse de Kabue ! Quelle ironie de l’Histoire !

3° La vision de la formation au Petit Séminaire de Kabwe

On ne peut mieux la cerner qu’à travers cette lettre du fondateur, Mgr Auguste De Clercq. Le 14 octobre 1935 il écrivit ceci aux directeur et professeurs de ce Petit Séminaire : « A ma dernière visite, je vous ai demandé de vouloir élaborer, avec l’expérience déjà acquise, le programme des humanités telles qu’elles s’imposent à la formation intellectuelle de nos jeunes séminaristes… Elles demeurent conditionnées par leur (terme final) : philosophie et théologie… La branche maîtresse est toujours la branche littéraire et linguistique, parce qu’elle tient le grand rôle dans la formation de l’intelligence, dans la disciplination de l’esprit ; elle saisit le jugement comme elle tient compte du sentiment. La seconde en ordre d’importance formative est la branche arithmétique-mathématique ; sa portée formative lui vient de son exactitude, de sa précision rigoureuse ; son enseignement doit donc avoir pour but de faire acquérir à nos élèves des habitudes mentales d’exactitude et de précision ».

Ainsi le corps enseignant était très exigeant dans le domaine des études et tous les élèves qui n’obtenaient pas des résultats satisfaisants étaient renvoyés sans pitié. On appliquait une sélection sévère et on se rappelait sans cesse que le Petit Séminaire n’était pas une école quelconque accessible à tous ceux qui voulaient étudier, mais une école formant de futurs prêtres et tous ceux qui ne donnaient pas les garanties nécessaires ou n’avaient pas les qualités intellectuelles ou morales indispensables en vue du sacerdoce étaient renvoyés.

Mais l’heure était venue de séparer le Petit et le Grand Séminaire de Kabwe.

4° Le Grand Séminaire de Kabwe

En effet, déjà en 1923, à la réunion des Supérieurs ecclésiastiques du Congo, tenue à Stanleyville (actuel Kisangani), il avait été question de Grands séminaires Régionaux à fonder. Mais ce n’est qu’en 1927 que les trois Vicaires Apostoliques scheutistes – De Clercq du Kasayi, De Boeck de Nouvelle Anvers ou Makanza, en Equateur et De Cleene de Kinshasa – échangèrent des correspondances en vue de la création d’un Séminaire Régional pour leurs trois Vicariats. Cependant, ils ne parvenaient pas à se mettre d’accord sur le lieu, chacun d’eux plaidant pour sa propre chapelle : De Cleene voulait le Bas-Congo qui incluait aussi Kinshasa et De Boeck de l’Equateur se ralliait à cette thèse à cause de la facilité des communications entre les deux endroits, tandis que De Clercq tenait  à ce que ce Grand Séminaire Régional soit installé à proximité de son Petit Séminaire de Kabwe qui était le plus avancé de tous, car il était le deuxième au Congo après celui de Mpala à Baudouinville  et le troisième en Afrique après celui de Kampala, en Ouganda, qui les avait précédés.

C’est alors que le Père Général de Scheut, Père Rutten, trancha par sa lettre du 14 juin 1929 aux trois Vicaires Apostoliques en écrivant : «Tout bien considéré, nous jugeons que le Séminaire de Kabwe au Kasayi est le plus avancé des trois Séminaires scheutistes et qu’il devrait devenir le Séminaire Central (appelé aussi Séminaire intervicarial). L’abondance des vivres, le nombre des chrétiens et des vocations, les facilités de bâtir et les avantages du climat, tout cela favorise ce projet » (remarquons, en passant, combien le Kasayi était en avance sur beaucoup d’autres territoires au Congo en ce temps-là et pourquoi le pouvoir colonial avait même envisagé de faire de Luluabourg la Capitale du pays!).

Non sans résistance, surtout de la part de Mgr De Cleene, de Kinshasa, les deux autres Vicariats envoyèrent donc leurs premiers séminaristes, dont 5 philosophes, au Petit Séminaire de Kabwe qui, comme on le sait, comprenait aussi le cycle de Philosophie, tous les deux cycles sous la même direction, d’abord du Père Aimé Van Zandijcke, puis du Père Georges Kettel, futur Vicaire Apostolique et Evêque de Kabinda à partir de 1953 et du Père Georges Demol qui deviendra le deuxième Vicaire Apostolique de Luluabourg, après Mgr De Clercq.

Quant au choix du Saint Patron de ce Grand Séminaire, Mgr Kettel proposa au Supérieur Général de Scheut, le 20 janvier 1932, le nom de « Notre Dame du Bon Conseil », mais ce dernier opta plutôt pour le nom de « Christ-Roi », afin que les futurs prêtres se rappellent toujours qu’ils sont envoyés en mission par le Christ Jésus.

  1. Le triple déménagement de ce qui est aujourd’hui le Théologat de Malole
  2. De Kabwe à Kabwe

1° L’installation

C’est le 27 décembre 1933 que les philosophes partirent, accompagnés de tous les petits séminaristes, vers leurs nouveaux bâtiments, qui étaient en construction, à deux km de là.

Son premier Recteur fut le Père Georges Demol. Puis ce fut le Père Georges Kettel dont le record de longévité à la tête de ce Séminaire n’a pas encore été battu jusqu’à ce jour, puisqu’il est resté plus de 16 ans dans la fonction.

Déjà en 1932, les deux grands séminaristes du Kasayi qui étaient à Baudouinville regagnèrent le Grand Séminaire de Kabwe encore abrité au Petit Séminaire. C’est alors que René Tshibuabua abandonna lui aussi la voie du sacerdoce, tandis que Charles Mbuya alla faire quelques mois de son année de probation à la Mission Tielen, actuel Tshilomba, avant de revenir encore au Séminaire et d’être, enfin, ordonné à Mikalayi premier prêtre autochtone du Kasayi, comme déjà dit, le 1 juillet 1934. Depuis ses débuts au Petit Séminaire de Mikalayi en 1916, 18 longues années étaient passées. Cela s’explique par l’organisation des études alors en vigueur au Grand Séminaire.

2° L’organisation des études et la conception de la formation

L’organisation des études était la suivante : 3 années de philosophie, 5 années de Théologie et une sixième année dite de probation (ou stage aujourd’hui) avant l’ordination sacerdotale. Et pourtant quand on jette un coup d’œil au programme de cours, on se rend compte qu’ils n’étaient pas si nombreux ni si variés. Dans l’année académique 1966-1967, par exemple, la dernière sous le rectorat d’un Scheutiste belge, on comptait les cours suivants :

  • en Philosophie : Histoire de la Philosophie, Sciences naturelles, Ecriture Sainte, Liturgie, Economie sociale, Ascèse, soit deux cours seulement à caractère proprement philosophique !
  • en Théologie : Théologie Dogmatique, Histoire de l’Eglise, Théologie Morale, Ecriture Sainte, Liturgie, Droit Canon.

L’explication de la longueur extrême des études au Grand Séminaire se trouvait, sans doute, aussi, dans l’idée que se faisaient les formateurs de Scheut des capacités intellectuelles de leurs étudiants noirs. Voici, par exemple, ce qu’on peut lire dans un document rédigé en 1934 par le P. Camille Leuridan, le premier professeur de philosophie au Séminaire de Mikalayi, et intitulé « Quelques indications pour l’enseignement de la Philosophie au Congo », document qui mérite d’être longuement cité. 

On y dit qu’il s’agit de trouver « une méthode d’enseignement parfaitement appropriée à la mentalité, ou plutôt à l’indigence mentale de nos élèves, d’une part, et, d’autre part, aux exigences de bonnes études théologiques ». On y écrit que, contrairement à ces élèves noirs, « dès leurs premières années, les enfants européens voient et entendent autour d’eux tant de choses qui viennent meubler leur esprit et qui forment la base de l’édifice scientifique qu’ils construiront au cours de leurs études. L’enfant noir, au contraire, rencontre bien peu de choses dans son milieu inculte, et ce peu est encore si mal coordonné, si dépourvu de raisonnement. Ses facultés intellectuelles ne s’exercent guère à la réflexion. Le pourquoi des choses, élément essentiel de toute science, le préoccupe rarement. Il ne comprend pas ; il ne cherche pas à comprendre. Il ne trouve d’intérêt que dans ce qui lui est d’une utilité immédiate pour la vie. Pourquoi raisonner sur la nature des phénomènes et des événements et sur les causes qui les provoquent ? Pourquoi chercher à en faire une synthèse ou à faire des déductions ? Sa façon de construire sa hutte, de cultiver son champ, toute sa manière d’agir est dictée par une confiance aveugle dans la coutume ancestrale… Voilà pourtant les enfants que ces quelques années d’études moyennes ont dû préparer à l’étude de la philosophie qui est le couronnement des autres sciences… Voilà où l’on a l’ambition d’amener ces enfants pris parmi des gens dont l’ancien gouverneur général du Congo belge, Monsieur Ryckmans, a écrit : ‘Leur ignorance est insondable, absolue, universelle’… Si encore on pouvait, dans cet enseignement, employer leur langue propre. Mais la langue indigène est si pauvre en termes abstraits et manque même de noms pour désigner tant de choses dont il faut nécessairement parler. Et bien souvent l’on constate que le mot latin, ou même le mot français, n’est pas compris par eux dans le sens qu’on lui donne dans la phrase énoncée… ».

Mais le temps approchait où l’état d’esprit des Séminaristes, de qui on pouvait dire de telles choses, allait radicalement changer.

3° Les temps nouveaux de la formation au Séminaire de Kabwe

Ils étaient emmenés par le double vent puissant de l’avènement de l’indépendance politique de plusieurs pays d’Afrique dans les années 60 et du renouveau pastoral du Concile Vatican II, tenu de 1959 à 1965.

A propos de l’influence de l’avènement des indépendances politiques en Afrique, le dernier Recteur belge du Grand Séminaire philosophique et théologique de Kabwe, Père Eugène Verhaert, fit aux Evêques du Kasayi, dans leur réunion du 9 et 10 décembre 1966, le rapport suivant : « Les bourrasques de l’indépendance et des luttes tribales, avec leurs conséquences défavorables, ont fait brusquement baisser le nombre des séminaristes de 90 à 17 en 1961. De façon générale, les années 1957 à 1961 ont été très difficiles à Kabwe. L’esprit d’indépendance qui régnait dans tout le pays avait aussi envahi les séminaristes. Les relations entre éducateurs et séminaristes étaient extrêmement délicates : tout était interprété sous l’angle ‘blancs-noirs’… ».

Quant au Concile Vatican II, il a été principalement un Concile pastoral d’ouverture aux valeurs du monde, aux cultures de tous les peuples de la terre et aux autres religions que le christianisme. Et le Séminaire ne pouvait pas y rester indifférent.

Nous pouvons dire qu’un des premiers acteurs de ces temps nouveaux à avoir jeté un pavé dans la mare de ce Séminaire fut Mgr M. L. Bakole. En effet, fort certainement de son expérience de premier étudiant ecclésiastique congolais dans la naissante Université Lovanium (aujourd’hui UNIKIN), fondée à Kinshasa en 1954, puis de directeur national du Bureau de l’Enseignement Catholique (BEC, en sigle), ancêtre de notre coordination nationale des Ecoles Conventionnées Catholiques, ensuite de premier Vice-Recteur noir de la même Université Lovanium où il avait étudié, et, enfin, de grand voyageur à travers beaucoup de pays dans le monde, avant de devenir premier Evêque Auxiliaire autochtone de l’Archidiocèse de Luluabourg en septembre 1966, il écrivit, le 15 novembre 1966, quelques mois à peine après cette ordination épiscopale, une lettre-document de travail de 9 pages aux Evêques du Kasayi en vue de leur réunion précitée du 9 au 10 décembre 1966.

Elle était intitulée : « Pour un Grand Séminaire d’aujourd’hui. Quelques réflexions » et était totalement appuyée sur les documents de Vatican II en matière de formation des prêtres ainsi que sur l’évolution de mentalités. Arrêtons-nous un instant sur son dernier point qui parle de « Emplacement du Séminaire et formation ouverte » où il écrit : « Pour une formation ouverte au dialogue, la place géographique et sociologique du séminaire a son importance, car pour une formation ouverte et une préparation au dialogue avec les hommes dans les divers aspects de la condition humaine d’aujourd’hui, le rapprochement du Séminaire avec la ville et ses banlieues ou avec les grands centres est nécessaire. Il y a évolution de la mentalité monastique du temps passé qui plaçait le séminaire dans un endroit retiré et calme à la façon des monastères anciens… Il y a des institutions multiples avec lesquelles les séminaristes devraient prendre contact… La ville et la banlieue est un milieu polyvalent sociologiquement et culturellement au contact duquel les séminaristes seront facilement enrichis et équipés pour le dialogue… ».

A la même occasion, dans son mot de bienvenue aux Evêques venus en réunion au Grand Séminaire de Kabwe, le président des séminaristes, Oscar Bimwenyi, revint spécialement sur le point de la culture africaine en déclarant : «  Nous ne pouvons pas terminer ce petit mot sans porter à votre connaissance notre intention de contribuer à l’activité pastorale de nos diocèses également par quelques études des us et coutumes de nos populations en vue d’une évangélisation et d’une catéchèse adaptées… ».

Sur une telle toile de fond qui orientait le nouvel état d’esprit des séminaristes, à côté de quelques problèmes plus matériels des infrastructures, les temps étaient mûrs pour un nouveau transfert du Théologat.

  1. De Kabue à Katoka Ste Famille (centre Thabor)

1° Installation

Les démarches avaient été entreprises pour le transfert du cycle de Théologie de Kabwe à Luluabourg-Katoka, au Scholasticat de Scheut.

Le 6 mai 1968, le Père Godefroid Mukeng, premier prêtre scheutiste congolais et devenu, en 1967, le premier Recteur autochtone du Grand Séminaire de Kabwe, écrit ceci, en français et en tshiluba, à Mgr Bakole, devenu Archevêque de Luluabourg la même année 1967 : « Mon père Martens nyewu ufuma ku tshisangilu tshia Ba-Provincial ku Kinshasa, wamba ne : en principe tous les Provinciaux ont donné leur accord pour donner Katoka pour le Séminaire… Donc Katoka est libre… Scheut veut vendre tout au lieu de louer. Mais je pense qu’il faudrait louer quelque temps, quitte à voir après… Nous gagnons en allant à Katoka dès septembre prochain. Reste le problème de quelqu’un qui pourrait prendre la direction ici pour le Philosophicum. Car il faudrait vraiment quelqu’un de bien « bua kulama bana, tshianana badi banyema bonso. Mioyo mivule ».

Mais, dans un premier temps, Le Père Mukeng garda la double direction des deux sections de Théologie et de Philosophie, faisant continuellement la navette entre les deux Maisons distantes de plus de 70 km l’une de l’autre, en dépit du mécontentement des professeurs restés à Kabwe.

Le dimanche, 22 septembre 1968, il y eut Messe du Saint Esprit au Théologat de Katoka, avec le lendemain, 23 septembre, le début des cours. La nouvelle année scolaire dans cette Maison comptait, outre le Recteur, 5 professeurs permanents, tous scheutistes.

Les séminaristes des 4 années de Théologie, pionniers de Katoka, étaient au nombre de 28, quatre autres ayant été envoyés aux études à Kinshasa ou à Rome.

2° Un nouveau Recteur autonome au Philosophicum de Kabwe

 C’est l’abbé Marcel Tshibanda, du diocèse de Mbujimayi, qui fut nommé à ce poste, en 1970, par la Conférence des Evêques du Kasayi, en remplacement du Père Mukeng.

Entretemps, dès la première année du Théologat au Thabor, on se mit à préparer son nouveau et dernier déménagement.

  1. De Katoka à Malole

1° Un nouveau projet

Dès la réunion de la Conférence Episcopale Provinciale de Luluabourg en mars 1969, le Père Mukeng fit aux Evêques le rapport suivant, qui donnait raison à sa suggestion de ne pas acheter ce site à Scheut : « Actuellement, dit-il, Katoka est comble ; il faut de toute urgence commencer des constructions pour les 16 philosophes actuellement en 2è Philo. Pour la suite il faut prévoir au moins 60 chambres pour les étudiants en Théologie ; si l’on compte les professeurs, il faut au moins 75 chambres, sans parler des salles communes, avec possibilité d’agrandir. Or, à Katoka, on a les inconvénients de l’étroitesse de l’endroit…, trop confiné par les habitations de la cité ; puis on a des chambres chaudes, non aérées, le manque d’eau, des tuyauteries mal installées, la vieillesse des bâtiments, avec des crevasses, des W.C bouchés, cuisine et buanderie délabrées…, un style de couvents avec chambres les une vis-à-vis des autres et un corridor entre les deux… Le souhait est qu’il faudrait construire un Séminaire moderne à un autre endroit de la ville, pas trop dans la ville, pas loin de la ville, mais en ville et à un endroit assez isolé… ; plus spacieux : avec toute la joie de l’espace africain ; ayant des facilités en fait d’approvisionnement en eau et électricité de la ville, ou même possibilité d’installations propres, ainsi que des facilités pour les déplacements des séminaristes… ; un style de construction moderne et modeste qui doit favoriser la vie de famille en équipe en harmonie avec la vie de la grande famille du Séminaire ; de petits homes groupant 5 à 6 chambres avec un petit local commun pour les réunions d’équipe, l’ensemble des petits homes formant l’unité, mais non confinés ; des chambres claires, fraîches et aérées ». Et il concluait en disant que « les démarches en vue d’obtenir un pareil terrain devraient être déjà faites en ce moment ».

Comme on peut le voir, le nouveau complexe de ce Grand séminaire est tel que l’avait dessiné la plume littéraire du Recteur Godefroid Mukeng en 1969. Et les démarches d’acquisition de ce lieu commencèrent aussitôt, comme il l’avait souhaité.

2° Les démarches

C’est le Père Mukeng lui-même, avec Mgr Kapanga Jacques, alors Vicaire Général de Luluabourg, qui se mirent à parcourir l’immense plateau de l’Oasis, près de la plaine d’aviation, et qui tombèrent sur la concession appelée « Ma Campagne ». Mgr Bakole, avec la contresignature du Recteur Mukeng, écrivit alors, en date du 8 juillet 1969, une lettre au Gouverneur de la Province du Kasayi Occidental, M. Ntikala, où il lui disait : «Nous venons solliciter auprès de vous les titres de pouvoir utiliser, dans la concession ‘Ma Campagne’, qui appartient à la SOGETI, les terres qui n’ont jamais été mises en valeur et qui sont, de ce fait, des biens abandonnés, tombant sous les exigences de la loi Bakajika, afin d’y ériger un Theologicum pour la formation solide, adéquate et adaptée des prêtres des huit diocèses du Kasayi entier… Il s’agit précisément : d’un terrain de quarante hectares trois ares nonante-quatre centiares, destiné à usage agricole… ; d’un terrain de trois cent vingt hectares vingt et un ares trente-six centiares, destiné également à usage agricole… ; et, si la chose était possible, nous y ajouterons volontiers le reste du terrain qui prolonge cette concession jusqu’à la rivière Tshibashi ».

La réponse du Gouverneur fut positive, dans la limite de ses compétences. Mgr Bakole avait, en même temps, demandé à Rome un subside extraordinaire de quarante mille dollars américains pour achat de cette concession. Et le 10 mars 1970 eut lieu la cérémonie de la pose de la première pierre. Sept mois après, le nouveau Séminaire fut inauguré, avec ses deux premiers pavillons pour étudiants achevés. Douze séminaristes s’y installèrent les premiers, rejoint par le Recteur qui se rendait tous les matins avec eux à Katoka où continuaient à se dérouler toutes les activités de formation.

Enfin, le 13 février 1971 ce fut le déménagement total du Theologicum de Katoka à Malole-Ma Campagne.